Méditation sur l’icône de « Marie, Refuge des derniers temps » (1)

Introduction

L’Icône de la Mère de Dieu du « Refuge » écrite par Marie-Jacinta s’inspire d’une iconographie très rare qui représente la Mère de Dieu confiée à l’Apôtre Jean après la mort de Jésus comme le relate le Saint Evangile :

« Près de la Croix de Jésus se tenait sa Mère… Voyant sa Mère, et près d’elle le disciple qu’Il aimait, Jésus dit à sa Mère : « Femme, voici ton Fils ! » Puis Il dit au disciple : « Voici ta Mère ! » Et à partir de cette heure-là, le disciple la prit chez lui… » (Jn 19,25-27).

Par les paroles créatrices du Verbe fait chair (Jn 1,14), le mystère de la Mère de Dieu s’ouvre sur un autre, non moins bouleversant : Elle devient à travers Jean, son premier enfant, la « Mère des hommes »… cela ouvre un immense horizon, même si elle l’a vécu ensuite dans le silence de l’humilité priante sur les hauteurs d’Ephèse : La Vierge Marie est devenue ma Mère ! Cela se dessinait déjà à sa « Visitation » où Elisabeth a cette parole prophétique qui laisse deviner sa future mission universelle : « Et comment m’est-il donné que la Mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ? » Cette parole révèle la tendresse que notre Mère aura pour moi et chaque enfant de Dieu comme elle le laisse aussi deviner dans son Magnificat : « désormais, toutes les générations me diront bienheureuse, car le Tout-Puissant a fait pour moi de grandes choses… sa miséricorde s’étend d’âge en âge ! » (Lc 1,48-50).

Il faut à l’évidence bien saisir ici que « depuis le temps où le disciple la prit « chez lui », le mystère de la maternité spirituelle de Marie a eu son accomplissement dans l’histoire avec une ampleur sans limites… car lorsque Jésus dit sur la Croix : « Femme, voici ton fils ! », il ouvrit d’une manière toute nouvelle le Cœur de sa Mère… Marie est Mère de tous les hommes et son empressement pour la vie de l’homme est de portée universelle[1]… Elle est « l’Omnipotentia supplex » : la toute-puissance suppliante et la prière de l’Eglise est comme « portée » par la prière de Marie[2] ! »

Ainsi, dans l’Icône initiale qui a inspiré Marie-Jacinta, la sagesse iconographique a voulu évoquer l’événement devenu comme intemporel où « la Vierge et Saint Jean l’Evangéliste sont représentés comme s’ils étaient encore au pied de la Croix et écoutaient les dernières paroles de Jésus… Jean est légèrement incliné vers la Vierge, mais il regarde le spectateur, comme s’il voulait l’associer à la lourde responsabilité qui pèse sur lui : accueillir chez lui la Théotokos, la Mère de Dieu[3]… »

L’inspiration de l’Icône « écrite » par Marie-Jacinta est née d’un vécu : le mystère de la relation unique entre la Théotokos et Jean contemplé à travers ces lieux chargés de sens prophétique et de lumineuse beauté que sont Ephèse et Patmos… Là, inoubliable contemplation silencieuse de ces paysages d’une splendeur presque intemporelle où les regards de la Vierge et de Jean se sont longuement posés, et si souvent croisés de près ou de loin… Là, une partie de nos cœurs est restée et nous inspire toujours dans notre vécu quotidien où domine le silence.

Et si la prière habite le cœur, on découvre en ces lieux l’humble Présence de la Mère au Cœur immense : Celle qui a enfanté Jean à la contemplation de la fin des temps qui résonne en son Apocalypse[4] ! N’est-il pas le livre biblique le plus mystérieux et le plus troublant ? L’écrit final sacré qui vient clore toute la Bible ? C’est ici qu’Il faut entrer dans le sens premier de « l’Apocalypse » qui signifie « Révélation[5] » en n’oubliant jamais que cette Révélation se déploie dans les sinuosités troublantes de l’histoire. C’est sans doute pourquoi, dès le prologue, l’Apôtre Jean commence par une « béatitude[6] » qui nous invite à l’espérance : « Heureux celui qui lit ce livre et écoute les paroles de la prophétie en les gardant, car le temps est proche ! » (Ap 1,3).

 

 

[1] Saint Jean-Paul II, Homélie à Fatima, 13 mai 1982.

[2] Saint Jean-Paul II, Lettre sur le Rosaire, n°16.

[3] Alfredo Tradigo, Icônes et Saints d’Orient, La Mère de Dieu du Refuge, Ed. Hazan, 2005, p. 209.

[4] C’est vers 95 qu’apparaît le livre de l’Apocalypse, premier écrit sacré de Jean alors qu’il est encore captif à l’île de Patmos. On situe son Evangile et ses Epîtres vers 96-98. La mort de Jean advient au début du Règne de l’Empereur romain Trajan vers 98-100.

[5] Du grec apocalypsis, action d’enlever (apo : « loin de ») ce qui cache (kalyptô, « cacher ») : « révélation » dont l’Esprit gratifie tel ou tel croyant.

[6] C’est la première des 7 béatitudes de l’Apocalypse : 14,13 / 16,15 / 19,9 / 20,6 / 22,7 et 14.