Fatima : apparition du 13 septembre 1917
Extrait du livre Mon Coeur Immaculé triomphera, Fatima, révélation des derniers temps, Marie-Michel, Editions du Jubilé 2017
« Continuez à dire le chapelet… «
A cette cinquième venue de Notre-Dame, on estima la foule autour de trente mille personnes. Beaucoup s’étaient mis en route la veille et dès l’aube du 13 septembre, tous les chemins des environs de Fatima étaient remplis de monde. Un témoin raconte avec émotion : « J’étais profondément ému, et plus d’une fois les larmes me sont montées aux yeux, en voyant la piété, les prières et la foi ardente de tant de milliers de pèlerins qui récitaient le chapelet en marchant. Il n’y avait pas un chemin ni un sentier qui ne fut encombré de monde, et jamais encore de toute ma vie, je n’avais assisté à une si grandiose et si poignante manifestation de foi[1]. »
Ce jour-là aussi, plusieurs séminaristes étaient présents dans la foule et également quelques prêtres dont le Père Jean Quaresma. Il deviendra plus tard Vicaire général du diocèse de Leira, et aussi membre de la commission d’enquête canonique sur les Apparitions. Il venait dans un esprit à la fois ouvert et critique pour rester objectif. Dans une lettre à un ami prêtre qui était avec lui à l’Apparition du 13 septembre, il donne un témoignage émouvant de sincérité : « Les petits bergers priaient, en attendant la céleste Apparition, et à midi le silence se fit dans la foule. On n’entendait plus que le murmure des prières… et à mon grand étonnement, je vois alors, clairement et distinctement, un globe lumineux se déplaçant du Levant vers le Couchant, et glissant majestueusement dans l’espace. Vous aussi, cher ami, vous avez eu le bonheur de voir la même apparition inespérée et émouvante… et vous paraissiez enthousiasmé de ce que nous avions vu… C’était Notre Dame qui venait ! Telle était bien aussi ma conviction. Les petits bergers avaient vu la Mère de Dieu elle-même ! A nous, il avait été donné de voir comme le véhicule qui l’avait transportée du Ciel jusqu’à la lande inhospitalière[2]… »
Dans ses souvenirs, Lucie décrit l’arrivée des enfants à la Cova et cela fait penser à certaines scènes de l’Evangile où Jésus est parfois attendu par une foule immense comme sur le mont des béatitudes (Mt 5,1) ou au bord du lac de Tibériade (Mc 6,34) : « Les chemins étaient remplis de monde et tous voulaient nous parler. Il n’y avait pas de respect humain. Beaucoup de personnes, même de la haute société, fendant la foule qui se pressait autour de nous, tombaient à genoux et nous priaient de présenter leurs supplications à la Sainte Vierge. D’autres, ne réussissant pas à nous approcher, nous criaient de loin… même du haut des arbres sur lesquels ils étaient juchés pour mieux voir : « Pour l’amour de Dieu, priez la Sainte Vierge de guérir mon fils estropié !… Qu’Elle guérisse mon enfant aveugle !… Qu’Elle fasse revenir du front mon mari… mon fils !… Qu’Elle convertisse un pécheur qui m’est cher !… » On nous recommandait de la sorte toutes les misères de la pauvre humanité !… Et nous : disant oui à l’un, tendant la main à l’autre… nous avancions toujours, aidés par quelques hommes qui nous frayaient le chemin à travers la foule[3].»
Quand les enfants arrivèrent près du chêne-vert, Lucie se tourna vers la foule et cria : « Il faut prier ! » Un témoin se souvient de cette scène étonnante : « Jamais je n’oublierai la violente impression que j’éprouvai en voyant ces milliers de pèlerins tomber à genoux à la voix d’une enfant de dix ans[4] ! » Alors, tout le monde se mit à réciter le chapelet avec les trois enfants. Il n’y avait plus de riches ou de pauvres, de simples ou d’instruits, d’adultes ou d’enfants, car c’est le peuple de Dieu qui était là en prière avec sa Mère du Ciel.
Plusieurs prodiges s’opérèrent confirmés par des milliers de témoins : on constata un affaiblissement de la lumière du soleil, au point de distinguer les étoiles du ciel ; un rafraîchissement soudain de l’atmosphère ; et enfin, il se mit à pleuvoir une multitude de fleurs blanches qui disparaissaient avant de toucher terre.
Soudain jaillit l’éclair dans le ciel et c’est le signe que la Vierge approche. Quelques instants après, Elle est là devant eux sur le petit chêne-vert et, enveloppés dans sa lumière à la fois si douce et indicible, les trois petits sont prêts à écouter son message :
– « Que voulez-vous de moi ? dit à nouveau Lucie.
– Continuez à dire le chapelet tous les jours pour obtenir la fin de la guerre. En octobre, Notre Seigneur viendra ainsi que Notre Dame des Douleurs et Notre Dame du Carmel, et aussi Saint Joseph avec l’Enfant-Jésus, pour bénir le monde. Dieu est content de vos sacrifices, mais il ne veut pas que vous dormiez avec la corde. Portez-la seulement pendant le jour. »
Ici, Lucie lui présente alors plusieurs demandes de guérisons pour des malades qu’on lui avait recommandés : « J’en guérirai quelques uns, répondit la Vierge, mais pas les autres, parce que Notre Seigneur ne se fie pas à eux. » Cette réponse nous renvoie directement à l’Evangile. Car, plus profondément, « cela peut signifier que bien des malades avec leur entourage ne s’ouvrent pas aux dispositions de foi, de contrition et de ferveur qu’il conviendrait d’avoir pour obtenir une guérison surnaturelle[5]… » Car la Sainte Vierge n’est pas une « guérisseuse » à souhait. Elle situe d’abord ses enfants avec Elle dans le plan de la Rédemption où la maladie, le handicap, l’épreuve s’avèrent être parfois un meilleur chemin que la pleine santé. Marie, dans sa tendresse, est penchée à chaque instant sur ses enfants pour les aider à accomplir la volonté mystérieuse de Dieu qui, seule, mène au Ciel.
Vers la fin, Lucie confie à la Sainte Vierge ses épreuves vis-à-vis de ceux qui n’accueillent pas ses Apparitions et la rejettent. Elle lui demande un signe que tous pourront voir ! Et Marie confirme : « En octobre, je ferai un miracle pour que tous croient ! »
Après ces dernières paroles, la Femme revêtue de lumière (Ap 12,1) commence à s’élever de nouveau dans le Ciel et d’un geste, Lucie orienta les regards en disant : « Si vous voulez la voir, regardez par là ! » Ils virent soudain « le globe de lumière remonter dans l’azur. Alors, la belle nuée blanche s’évanouit, les fleurs mystérieuses cessèrent de tomber, le soleil retrouva son éclat habituel[6]. »
C’est sa cinquième venue et Marie insiste à nouveau sur le « chapelet quotidien » pour « obtenir la fin de la guerre ». En cette fin des temps, un siècle plus tard, et face au déferlement de toutes sortes d’épreuves présentes et à venir… Il faudra donc se souvenir à jamais de cette puissance du Chapelet qui ouvre les cœurs à Dieu et arrête les guerres ! Et puis, la Vierge manifeste encore ici sa tendresse de Mère. Elle leur transmet de la part du Dieu-Amour une information qui, à la fois, les confirme sur leur voie et les ajuste dans leur offrande : « Dieu est satisfait de vos sacrifices, mais il ne veut pas que vous dormiez avec la corde. Portez-la seulement pendant le jour. » Cela nous montre à quel point Dieu et sa Sainte Mère sont attentifs à chaque détail de nos vies avec une délicate prévenance !
Dans le même sens, comment ne pas voir ici l’œuvre de la divine Providence en la personne du Père Manuel Nunes Formigao, Chanoine de Lisbonne et alors professeur au Séminaire et au Lycée de Santarem. Aimable, prudent et délicat, il gagna vite la confiance des trois petits voyants et de leurs familles. Ainsi, dans un climat de confiance et de paix, ce prêtre à la fois érudit et simple put interroger et écouter les enfants. Les voyant régulièrement, il put se faire un jugement, aussi objectif que possible, sur les Apparitions et les aider aussi sur la voie de la sainteté. Il deviendra plus tard l’historien réputé de Fatima.
Ecoutons Sœur Lucie : « Il m’interrogea sérieusement et minutieusement. Je l’aimais beaucoup, parce qu’il me parlait de la pratique de la vertu, m’enseignant certaines manières de l’exercer… Il revint tous les mois m’interroger et me donnait toujours à la fin de bons conseils, ce qui me faisait un certain bien spirituel[7]. » Et comme le remarquait un habitant de Fatima : « C’est lui qui a vu clair dans tout cela… Il a été homme du moment[8] ! »
[1] J.C. Castelbranco, Le prodige inouï de Fatima, op. cit., p.33.
[2] Père De Marchi, Témoignages sur les Apparitions de Fatima, op. cit., p.137.
[3] Chanoine C.Barthas, Fatima 1917 – 1968, Histoire des Apparitions, Fatima – Editions, 1969, p.119.
[4] J.C. Castelbranco, Le prodige inouï de Fatima, op. cit., p.33.
[5] J.C. Castelbranco, Le prodige inouï de Fatima, op. cit., p.36.
[6] Chanoine C.Barthas, Fatima 1917 – 1968, Histoire des Apparitions, op. cit., p.122.
[7] Carmel de Coimbra, Un chemin sous le regard de Marie, op. cit., p.100-101.
[8] Père De Marchi, Témoignages sur les Apparitions de Fatima, op. cit., p.147.