Le Christ trouvera-t-il la foi sur la terre ?
« Veillez et priez en tout temps
afin d’avoir la force d’échapper à tout ce qui doit arriver,
et de vous tenir debout devant le Fils de l’homme ! »
Lc 21,36
Dans un Evangile de la Parousie[1], Jésus pose une question qui devrait remuer nos cœurs et contredire cette tranquillité trompeuse issue du monde… Sommes-nous dans l’illusion d’une paix fragile de surface ou vivons-nous de cette paix profonde issue de la foi ? La question centrale du Seigneur Jésus est plus que jamais d’actualité :
« Le Fils de l’homme, quand Il viendra,
trouvera-t-Il la foi sur la terre ? »
Lc 18,8
Cette interrogation du Seigneur devient de plus en plus lancinante en ce début du III° millénaire. Ne voyons-nous pas trop souvent une Eglise qui a peur ou pactise, témoigne du bout des lèvres ou même se tait devant les sordides délires de notre temps ? Où sont les voix libératrices des Saint Augustin et des Saint Jean Chrysostome ? En réalité, une Eglise qui néglige ou oublie l’urgence missionnaire qu’implique la Parousie n’est plus rayonnante de l’Evangile !… Elle a perdu « le feu missionnaire » en se noyant dans les priorités du monde. L’urgence climatique et la lutte contre les inégalités sont devenues plus urgentes que l’Adoration eucharistique où Dieu peut tout ! Et le silence actuel de l’Eglise sur l’Annonce du Christ « Lumière du monde » est tragique ! Il a et aura de terribles conséquences…
A son retour, Jésus trouvera-t-il la foi sur la terre ? Comment ne pas penser qu’à l’intérieur de cette question, Il ne se réfère implicitement à l’Adorable Eucharistie : l’œuvre de Dieu n’est-elle pas de croire en Celui qu’Il a envoyé ? (Jn 6,29). Or, voici que le Christ mène cette foi encore plus loin : « Qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui ! » (Jn 6,56).
Il est grand le mystère de la foi ! L’Eucharistie est le trésor suprême qui fait l’Eglise[2]. Et si elle perdait la foi en l’Eucharistie, l’Eglise perdrait tout en renonçant à son identité profonde…
C’est sans doute pourquoi, à la fin de son Pontificat, Saint Jean-Paul II a tant insisté sur « l’ars celebrandi » que tous doivent exercer à la Sainte Messe :
« A travers les rites et les prières, il faut se laisser rejoindre et envahir intimement par le mystère… pour que la liturgie puisse marquer toujours davantage la vie des personnes et des communautés, en devenant source de sainteté, de communion et d’élan missionnaire[3] ! »
Comme elle est vraie et vitale l’intuition de Jean-Paul II de « se laisser rejoindre et envahir » par l’ineffable Présence du Christ dans son Eucharistie. Là, comme nulle part ailleurs, l’homme se découvre « aimé de Dieu » : En effet, « toutes les religions sont les voies où l’homme cherche Dieu. Elles sont multiples. La Révélation chrétienne est unique car c’est Dieu qui trouve l’homme[4]. »
C’est en approchant de la Sainte Eucharistie que nous apprenons à aimer en nous laissant aimer. N’est-ce-pas ici le sommet de la foi chrétienne ? L’approche réaliste et saisissante de Sainte Thérèse d’Avila vient nous aider à le saisir en ouvrant véritablement les yeux de la foi… car si nous n’avons pas encore « la joie de le contempler avec les yeux du corps, tant Il se cache, Il se dévoile du moins aux yeux de l’âme et se manifeste à elle… c’est la foi qui me dit qu’Il est là et c’est une vérité certaine : tant que les accidents du pain ne sont pas consumés par la chaleur du corps, le Bon Jésus est en nous… Sous les accidents du pain, Il est d’un accès facile… Alors, approchons-nous de Lui !
Quand il était en ce monde, le simple contact à ses vêtements guérissait les malades (Mc 5,25-34) ; Pourquoi douter, si nous avons la foi, qu’Il ne fasse encore des miracles, quand Il nous est si intimement uni[5] ? »
+Marie-Mickaël
[1] Parousie, du grec parousia, signifie ordinairement « Présence » (être là) ou « venue ». Cela désigne l’Avènement du Seigneur, de son « Jour ». Attendue avec amour, la Parousie provoque un éveil, une conduite nouvelle, une conversion permanente…
[2] On connaît la célèbre formulation du Père de Lubac dans son livre phare, « Méditation sur l’Eglise » : « L’Eglise fait l’Eucharistie et l’Eucharistie fait l’Eglise ! »
[3] Malade et sans voix, le Saint-Père a envoyé ce message de la polyclinique Gemelli le 3 mars 2005.
[4] Paul Evdokimov, Les âges de la vie spirituelle.
[5] Sainte Thérèse de Jésus, Le chemin de la perfection, chapitre 36.