17 janvier : Apparition de la Vierge Marie à Pontmain
L’apparition de la Vierge Marie à Pontmain, se situe dans le contexte de la Guerre franco-allemande de 1870. Les armées françaises sont défaites. Metz, la plus importante forteresse d’Europe, assiégée en août, a dû se rendre à l’ennemi en octobre, Paris est assiégé et ses habitants meurent de faim, le Second Empire est tombé, les troupes prussiennes et alliées occupent une grande partie du territoire français. Le , les Prussiens prennent la ville du Mans et progressent vers l’ouest (donc vers la Mayenne), ils arrivent aux portes de Laval, la préfecture du département, distante d’une cinquantaine de kilomètres du village.
Pontmain est un petit hameau de moins de cent habitants, avec une quinzaine de maisons, situé en plein bocage. Les habitants sont « profondément catholiques », trois religieuses s’occupent de l’éducation (scolaire et religieuse) des enfants, ainsi que d’un petit pensionnat.
Outre les désordres liés à la guerre, une épidémie de typhoïde et de variole se déclenche dans la région.
Récit de l’apparition
Le début de l’apparition

Dans la nuit du , la neige couvre le hameau. Deux jeunes garçons, Eugène (12 ans) et Joseph Barbedette (10 ans), aident leur père à piler les ajoncs dans leur grange. Eugène sort de la grange pour « voir le temps » (il fait froid, la neige couvre les toits, mais le ciel est clair et étoilé). C’est alors qu’il déclare avoir aperçu au-dessus de la maison d’en face (maison Guidecoq), environ six mètres au-dessus du toit, une « belle dame » à la beauté incomparable et portant une robe bleue, qui le regarde en souriant, les mains tendues vers le bas. Il la regarde, et elle le regarde.
La description qu’Eugène en donnera à l’abbé Richard est la suivante : elle portait « une robe bleue, comme un sarrau d’enfant ». Une robe d’une pièce du cou jusqu’aux pieds. « Elle avait des chaussons bleus comme la robe, et au milieu, un ruban d’or formait un nœud en forme de rosette ». La robe bleue est constellée d’étoiles d’or. Un voile noir cachait ses cheveux et ses oreilles, il recouvrait le tiers du front, retombait sur les épaules jusqu’à la moitié du dos. Sur la tête elle portait une couronne d’or, sans autre ornement qu’un petit liséré rouge, situé presque au milieu. La couronne était posée sur le voile et haute de vingt centimètres. Au pied de la dame, de nombreuses étoiles scintillent.
L’enfant appelle une voisine, Jeannette Détais, venue rejoindre son père, pour lui demander si elle voit quelque chose, mais cette dernière lui avoue ne rien voir de spécial. Il appelle son père et lui pose la même question, et son père lui donne la même réponse. Mais son frère Joseph, lui, déclare voir « une grande et belle dame ». Le père des enfants « ne pouvant croire que ses enfants voyaient quelque chose que lui-même ne voyait pas », fait appeler sa femme et sa domestique pour regarder dans la direction de l’enfant, mais elles ne voient rien non plus. Il en conclut que les enfants mentent et ne voient rien. La famille rentre manger la soupe. Après le repas, les enfants retournent voir « si on la voit encore ». Leur mère recommande aux enfants de prier. Comme « l’apparition se prolonge », on envoie chercher sœur Vitaline, une religieuse du village, membre des adoratrices de la Justice de Dieu, qui ne voit rien. Mais celle-ci retourne chercher trois pensionnaires de l’école, et deux des enfants, Françoise Richer (11 ans) et Jeanne-Marie Lebossé (9 ans), qui déclarent voir « la belle dame ». Leur description coïncide avec celle des garçons.
Premier tableau

On appelle alors le curé et d’autres enfants. Toutes ces allées-venues attirent l’attention de villageois qui, malgré la nuit glaciale, viennent voir ce qui se passe, si bien qu’une cinquantaine de personnes se retrouvent rassemblées dans la rue. En plus des quatre enfants déjà cités, trois autres, Eugène Friteau (6 ans), Auguste Avice (4 ans) et Augustine Boitin (25 mois), déclareront avoir eux aussi vu la « belle dame ». À l’arrivée du curé, l’abbé Guérin, les enfants déclarent que l’apparition change, et qu’un grand cercle se forme autour de la belle dame. Le cercle est bleu et distant de 50 cm environ. Les enfants voient aussi quatre bougies apparaître dans le cercle : deux au niveau des genoux, et deux à hauteur des épaules. Une petite croix rouge (grande comme un doigt), apparaît sur la poitrine de la Vierge. Le curé demande alors à l’assistance de prier, et une des religieuses présente organise la récitation du chapelet.
Second tableau
Durant la prière du chapelet, l’image se modifie : le cercle bleu s’agrandit ainsi que la dame, le nombre des étoiles (au pied de la dame) se multiplie, et sur la robe aussi les étoiles bougent et se multiplient, au point qu’un enfant ajoute « elle (la robe) est bientôt toute dorée ». La religieuse entonne ensuite le Magnificat, et les enfants disent qu’alors une grande banderole se déroule entre l’ovale et le toit de la maison, où s’inscrit lettre après lettre le message de la « Dame » : « Mais priez mes enfants ». Les enfants annoncent en chœur l’arrivée de chaque lettre, et l’assemblée reconstitue le message mentalement. Le curé enchaîne par le chant des litanies de la Vierge. Les enfants disent alors voir un complément au message s’afficher, toujours lettre par lettre : « Dieu vous exaucera en peu de temps ».
Deux nouveaux chants sont entonnés, et la suite du message s’affiche sur le bandeau : « Mon Fils se laisse toucher ». Les enfants précisent que cette phrase est soulignée par un trait d’or. À partir des mots « mon fils », l’assemblée estime que c’est bien la Vierge Marie qui est vue par les enfants.
Troisième tableau

Alors que l’assemblée entonne un cantique à la Vierge, les enfants disent que « la Vierge élève ses mains à la hauteur des épaules, et agite lentement les doigts », comme si elle accompagnait le chant du cantique, en regardant les enfants avec un sourire d’une douceur infinie. Les enfants s’écrient alors « Voilà qu’elle rit, voilà qu’elle rit ».
Quatrième tableau

Après dix minutes, l’assemblée, toujours en prière, entonne un chant de pénitence, le Parce Domine (Épargne, Seigneur !). Les enfants déclarent que l’inscription disparaît, et que le visage de la Vierge s’assombrit. Une grande croix rouge, avec un Christ de la même couleur, apparaît devant la dame. Sur une branche horizontale de la croix, les mots de « Jésus Christ » sont inscrits. Elle, prend alors le crucifix dans ses mains, l’incline légèrement vers la foule, et porte son regard non plus sur la foule, mais sur la croix qu’elle tient dans ses mains. Une des étoiles, située sous la Vierge, se met alors en mouvement, venant rejoindre la première bougie, située à son genoux gauche, et l’allume (les bougies étaient alors « éteintes » jusque là), puis, elle remonte à la bougie située au niveau de l’épaule, l’allume à son tour, et successivement, allume les quatre bougies qui entourent la Vierge.
Joseph Barbedette, dans sa déposition au procès canonique, déclarera « Pendant tout le temps que la très sainte Vierge garda le crucifix dans ses mains, son visage n’a pas pleuré : nous n’avons pas vu les larmes rouler dans ses yeux ; mais, spécialement au coin de la bouche, le tremblement des lèvres qui manifeste une vive émotion. Les lèvres remuaient, semblant prononcer les paroles du cantique de pénitence, que l’on chantait à ses pieds, spécialement au refrain, du Parce Domine ».
Fin de l’apparition
À la suite de cela, et alors que le curé fait chanter le cantique Ave Maris Stella, les enfants indiquent que le crucifix disparaît, la Vierge reprend son attitude initiale, les bras tendus vers eux, qu’une petite croix blanche surmonte chacune de ses épaules, et que le visage de la Vierge s’illumine à nouveau d’un sourire. Le curé demande ensuite de faire la prière du soir. Durant cette prière, l’apparition se recouvre peu à peu d’un « grand voile blanc », qui, partant des pieds, recouvre peu à peu la Vierge. Finalement, son visage disparait, ainsi que le disque bleu et les bougies. Il est 21 h, l’apparition a duré trois heures. Les villageois rentrent alors chez eux.